On sait combien la musique est importante dans l’œuvre Disney. On a tous en tête ces chansons interprétée par les héros des histoires. Mais certaines d’entre elles sont portées par des personnages secondaires tout aussi intéressants, ceux qu’on appelle les sidekicks. C’est le cas de Heigh Ho !
Ils sont ces personnages qui accompagnent le héros ou le vilain, d’ailleurs, et qui apportent bien souvent la touche comique dans l’histoire. Et les tous premiers d’entre eux, ce sont les sept nains de Blanche Neige. Et on peut dire qu’avec ces personnages, Walt a eu une idée de génie.
Une idée de Walt
Plus exactement, ces personnages ne sont pas une invention du papa de Mickey. Les sept nains existaient déjà dans le conte des frères Grimm. Mais dans l’histoire originale, ils n’ont pas de caractéristique distinctive et ne portent pas de nom.
Pourtant Walt est persuadé que c’est à travers ces personnages que l’on peut apporter la note d’humour et de légèreté afin de contrebalancer une histoire parfois sombre.
Et pour cela, il faut leur attribuer un nom, une apparence physique reconnaissable mais aussi des traits de caractère, des voix, des actions différentes.
Un travail de longue haleine
Trouver les caractéristiques des nains prendra des mois. On y travaille dès l’été 1934 et c’est en décembre 1935 que commence leur animation.
Entre temps, On leur attribue les noms les plus loufoques. Awful, Dirty, Cranky, Hungry, Crabby, Helpful, Tearful, Tubby, Shorty, Lazy, Stuffy, Jumpy, Weepy, Burpy Baldy. Walt avait même envisagé de les appeler Snick, Glick, Blick, Flick, Plick Whick et Quee !
Mais trois mois plus tard, le papa de Mickey se décide pour Doc, Happy, Sleepy, Grumpy, Bashful et Deafy qui devient finalement Sneezy. Soit, en français, Prof, Joyeux, Dormeur, Grincheux, Timide et Atchoum.
Un leurre de Walt
Six nains seulement ont donc été baptisé. Mais un désaccord au sein de l’équipe a entraîné un certain retard pour trouver le nom du dernier que l’on a longtemps appelé le Septième.
Pourquoi ce pauvre Simplet a-t-il donc été laissé de côté ? On avait en fait évoqué assez tôt de l’appeler Dopey. Mais cela faisait référence au mot « Dope » qui signifie « nouille » et certains n’appréciaient pas ce nom prétextant que la consonance était trop moderne pour un personnage d’un conte ancien.
Walt a alors grugé. Il a prétendu que Shakespeare lui-même avait utilisé ce mot dans l’une de ces pièces. A la vérité, aucune trace ni de Dope, ni de Dopey dans l’œuvre du dramaturge. Mais il y a bien une société de pêche du nom de Shakespeare qui avait donné ce nom à un leurre. On peut donc dire que le leurre a fonctionné !
Une vie de travail
On pourrait s’interroger sur la vie de ces personnages. Leur rôle tient à la nature même d’un conte. Le héros – l’héroïne dans le cas présent – est toujours confronté à un opposant. La Reine dans notre cas.
Mais il n’existe pas, non plus, de héros sans un adjuvant qui vient l’assister lorsque sa situation semble désespérée. C’est le rôle des nains.
Par contre, on ne sait rien de ces personnages si ce n’est qu’ils vivent dans une modeste chaumière au milieu de la forêt et qu’ils travaillent tout le jour dans une mine de diamants.
Et dans la mine, les tâches sont strictement définies entre eux. Joyeux, Grincheux, Timide et Atchoum piochent pour extraire les pierres précieuses qui sont ensuite acheminées grâce à un chariot tiré par un cerf et que conduit Dormeur, non sans difficulté vu les cabrioles de l’animal, ce qui donne lieu à une première scène comique.
En personne éclairée, Prof vérifie la qualité des diamants et écartent ceux qui présentent un défaut. Simplet, lui, balaie et jettent les pierres défectueuses.
Travailler en chantant
Et le travail se fait en chantant ! Pas un seul instant ils n’arrêtent de chanter sur un air enjoué. Pourtant leurs paroles montrent bien combien leur travail est pénible. Tic Tac Tic Tac … Ils comptent le temps qui passe car, ils le disent, ils piochent du matin jusqu’au soir !
Heureusement, l’horloge sonne et il est temps de rentrer … Le rythme change pour un refrain qui respire la gaité de rentrer chez soi avec un appel qui exprime à la fois une exclamation de lassitude, de déception, de surprise ou de bonheur. Et tout cela est contenu dans un simple Heigh-Ho !
Heigh Ho, plus qu’une exclamation
Si on devait comparer l’expression à un geste, on pourrait dire que c’est l’expression verbale d’un haussement d’épaules.
Heigh-Ho, c’est la vie et c’est aussi une expression très ancienne qui a été récupérée pour écrire cette chanson puisqu’elle est attestée dès 1553 afin d’exprimer la tristesse, un peu comme un soupir.
Elle se confond ensuite avec une forme plus ancienne, apparue dans la seconde moitié du XVème siècle, dans le milieu marin où elle symbolise le mouvement des marins tirant sur les cordes, un peu comme notre Ho Hisse !
Une bande originale soignée
Il reste à faire entrer Heigh-Ho dans une bande originale soignée. Walt Disney citait souvent comme éléments de son succès, la qualité de l’histoire, le soin de l’animation et la qualité de la partition. Il a donc toujours su s’entourer des meilleurs compositeurs.
Ce fut particulièrement le cas, dans les années ’30, pour ses Silly Symphonies. C’est à cette occasion qu’il rencontre Frank Churchill. Celui-ci enchaîne les compositions lorsqu’en 1933, Walt lui confie la musique des Trois Petits Cochons pour lequel il écrit le fameux Qui a peur du Grand Méchant Loup ? La chanson fait un carton et est reprise par tous les orchestres.
Pas étonnant donc que le papa de Mickey fasse appel à lui pour écrire les chansons de son premier long métrage. Il sera associé au parolier Larry Morey pour l’écriture des chansons du film. Et le succès des Trois petits cochons se renouvelle. Pour la première fois, d’ailleurs, une bande originale sera éditée en disque.
Et si aucun Oscar ne vient la saluer,la chanson des Nains, Heigh Ho, sera toutefois nommée ce qui est une belle reconnaissance pour une première. Elle aura, de plus, un tel succès que de nombreuses reprises verront le jour, parfois dans des styles très différents.
Par deux fois, ce cher Donald l’interprétera, à sa façon. Dans Le Bénévole et dans Donald le River.
Et personne n’a oublié cette scène où elle est interprétée par une salle entière de Gremlins.
Plus sérieusement, on peut encore épingler deux versions très intéressantes. On doit la première au groupe Los Lobos qui en fait une reprise en espagnol en 2009 pour leur album Los Lobos Goes Disney.
En 2013, c’est Dave Brubeck qui nous offre une version jazz qui apparaît que la bande originale du film Dans l’ombre de Mary.
Et voilà une version bien entraînante qui, Heigh Ho, donne envie de se mettre au boulot !