Chez Disney, les Vilains sont généralement accompagné d’un animal tout aussi cruel qu’eux.  On peut penser à Lucifer, Iago, Brutus et Néron, … Mais il est un exemple d’une vraie gentille affublée d’animaux odieux.  Je veux parler des chats Si et Am et de leur chanson : La Chanson des Siamois.

Quelle histoire !

Si et Am, ce sont les deux siamois fourbes de la gentille Tante Sarah dans La Belle et le Clochard.  Ce qui est remarquable, c’est qu’ils n’ont qu’une brève apparition dans le film.  Juste 2 minutes 30 à l’écran.  Et pourtant, leur présence marquera les esprits par leur fourberie dont la jolie Belle fera les frais.  

On rappelle les circonstances.  Le couple Darling a dû s’absenter et a donc demandé à l’adorable Tante Sarah de surveiller leur bébé.  Et voilà qu’elle arrive avec deux chats qui vont vite intriguer la petite chienne de la maison.  Il faut dire que les deux félins ont bien décidé d’être les maîtres des lieux, tentant de ne faire qu’une bouchée du canari et du poisson.  

Mais la petite cocker veille et voilà que commence une course-poursuite qui entraîne nombre de catastrophe : piano rayé, vase renversé, eau sur la moquette, rideaux lacérés, aquarium retourné.  Cela tournera à la bagarre lorsque Si et Am décideront de mettre la patte sur le lait du nourrisson. C’est un véritable champ de bataille que trouvera Tante Sarah.  Et c’est Lady qui en fait les frais, muselée et attachée à l’extérieur.  

Une histoire sans chat

La Belle et le Clochard est une adaptation de la littérature.  Dans les années 40, Walt Disney découvre dans le magazine Cosmopolitan “Happy Dan, the Whistling Dog” de Ward Greene, l’histoire de la rencontre entre deux chiens très différents : d’un côté la vie confortable en famille, de l’autre l’errance et l’aventure en toute liberté.  

Mais dans cette histoire, pas de chats siamois.  Pourtant, l’idée de ces deux personnages était déjà en gestation lorsque Walt décide de s’intéresser à cette histoire.  On a retrouvé ‘ailleurs des plusieurs recherches graphiques sur ces deux siamois datant du début des années 40.  Ils s’appelaient à ce moment Nip et Tuck et il était prévu de leur donner plus d’importance dans l’histoire.  Ils devaient même être les vrais méchants du film.

Encore plus méchants

A l’écran, ils commençaient par voler le lait du bébé pour finir par saccager le frigo lui-même. Mais dans la novélisation que Walt a demandée à Wars Greene en avant-première de la sortie du film, il dissimule le cadavre du rat qui s’était introduit dans la chambre du bébé, faisant ainsi accuser Clochard.  Le chien sera arrêté et condamné à être euthanasié par leur faute. Pris de remords, ils tenteront toutefois de se racheter en empêchant la mort du chien.

Chat méchant chez Disney

Mais décidément, les chats sont souvent bien méchants chez Disney.  Avec les petits protégés de Tante Sarah on assiste à l’éternelle rivalité chats et chiens.  Mais il semblerait que Walt Disney les appréciait peu à cause de leur indépendance de caractère qui les rend incontrôlables.  Rappelons-nous que son premier méchant, Pat Hibulaire, est un chat souvent cruel !

Ici, ils sont les vrais méchants, cyniques et sans scrupules alors que Tante Sarah n’est coupable de son aveugle passion pour eux.

De Nip et Tuck à Si et Am

C’est au cours de la production que l’on décide que ces chats seront des siamois et que l’on choisit leurs nouveaux patronymes, pour le jeu de mot qui conduit à Siam, l’ancien nom de la Thaïlande.

Et on peut s’interroger sur cet étrange choix et aucun document ne l’explique réellement.  Mais on peut penser qu’il est en lien entre la période de production du film.  Dans les années 40, les Etats-Unis sont, en effet, en guerre contre le Japon.  Les deux chats nous sont ainsi présentés telles des caricatures du personnage asiatique.  Yeux bridés et des incisives proéminentes et écartées.

Sujet à controverse

Bien évidemment, on comprend que la représentation a suscité des controverses au fil des ans. Certains critiques ont souligné que les stéréotypes associés aux personnages, notamment leur accent et leur comportement, peuvent refléter des clichés culturels. 

Cette polémique a conduit Disney à modifier les personnages dans son adaptation de 2019.  Si et Am s’appellent alors Devon et Rex, ils changent de race et deviennent un duo de chats mâles Rex gris. Et même leur chanson sera remplacée devenant What a Shame.

Il faut dire que l’air bien connu du duo Si et Am était également teinté de couleur asiatique.

La chanson des siamois : Une femme pour cette chanson

La chanson emblématique du duo, on la doit à une célèbre chanteuse de l’époque.  Associée à Sonny Burke, Peggy Lee est, non seulement, chanteuse mais aussi auteur et actrice.  Dans le film, elle prête sa voix aux deux chats mais aussi à Darling et Peg, la chienne des rues. 

La chanson qui est interprétée par les deux chats siamois malicieux est remplie de rimes et de jeux de mots, illustrant le caractère sournois des animaux et leur penchant pour le la provocation.

Musicalement, la mélodie est légère et accrocheuse avec des variations de ton et des changements de rythme qui ajoutent une certaine dynamique.

Les voix des deux chats créent une harmonie symbolisant leur relation et leur complicité. La technique renforce l’idée que les deux personnages sont en symbiose dans leur comportement machiavélique.

Une chanson simple … et pourtant si complexe

Mais ce qui est remarquable c’est l’ambiguïté qu’elle porte en elle.  Il est indéniable qu’elle est à l’origine de ce moment de conflit et de tension dans le film puisqu’elle perturbe l’harmonie de l’environnement familial. Elle sera donc le vrai point de départ du récit puisqu’elle est à l’origine de la rencontre entre Belle et Clochard.  

Et pourtant, en dépit de ses implications plus sombres, la scène apporte un moment de légèreté et d’humour qui va contribuer à l’engagement émotionnel du spectateur.

En d’autres termes, la chanson des Siamois est plus complexe qu’il n’y paraît.  Bien que divertissante elle soulève également un questionnement.

En somme, une chanson qui amène à la réflexion à travers la rencontre de ces méchants qui ne laissent pas insensibles et peuvent se targuer d’être aussi connus malgré leurs trois petites minutes d’apparition.