Le gouvernement français et Disney France ont lancé un partenariat inédit baptisé « Parlons santé mentale », une campagne de sensibilisation destinée à toucher environ 6 millions d’enfants du CP à la 6e grâce à l’univers du film Vice-Versa. Déployé dès le 10 octobre 2025, journée mondiale de la santé mentale, ce dispositif comprend des fascicules éducatifs, des spots publicitaires et diverses ressources pédagogiques pour aider les jeunes à comprendre et exprimer leurs émotions dans un contexte où 40% des 18-24 ans présentent des signes de dépression.
Points clés à retenir
- Disney participe à cette initiative sans rémunération financière, dans le cadre d’une tendance où les acteurs privés s’engagent pour des campagnes d’intérêt général.
- Le dispositif s’appuie sur les personnages de Vice-Versa qui incarnent les émotions fondamentales (joie, colère, tristesse, peur), facilitant la compréhension des mécanismes émotionnels chez les enfants.
- Des psychiatres expriment des réserves, craignant une instrumentalisation commerciale des questions de santé mentale et une simplification excessive des enjeux complexes.
- Cette campagne s’inscrit dans une stratégie gouvernementale impliquant plus de 300 partenaires privés pour diffuser des messages d’intérêt général.
- Malgré son caractère innovant, l’initiative ne répond pas à la crise structurelle de la pédopsychiatrie française qui manque cruellement de moyens et de personnel.

Disney et le gouvernement lancent « Parlons santé mentale » avec Vice-Versa
Le 9 octobre 2025, une annonce majeure a été faite dans les locaux de Disney France à Paris : un partenariat inédit entre le gouvernement français et Disney autour d’une campagne de sensibilisation à la santé mentale dans les écoles. Baptisée « Parlons santé mentale », cette initiative vise à toucher tous les écoliers du CP à la 6e, soit environ 6 millions d’enfants. Dès le 10 octobre, journée mondiale de la santé mentale, ces élèves recevront un fascicule éducatif conçu pour aborder la santé mentale à travers l’univers des émotions, incarnées par les personnages du célèbre film Vice-Versa.
Ce choix n’est pas anodin. En effet, le second opus de Vice-Versa, sorti en 2024, a rencontré un immense succès en France avec plus de 8 millions de spectateurs, devenant un vecteur culturel puissant pour accompagner cette campagne. Le contexte sanitaire et social actuel impose une urgence : selon les dernières données, plus de 40% des jeunes de 18 à 24 ans présentent des signes de dépression, et 54% des Français déclarent souffrir psychologiquement. Dans ce cadre, le gouvernement mise sur une approche innovante, ludique et accessible pour sensibiliser les plus jeunes à la compréhension et à l’expression de leurs émotions.
Fait remarquable, Disney participe à ce projet sans rémunération financière, soulignant ainsi l’engagement du géant du divertissement dans cette cause sociétale. Michaël Nathan, directeur du Service d’information du gouvernement (SIG), a précisé que cette collaboration s’inscrit dans une dynamique où les acteurs privés s’engagent pour des campagnes d’intérêt général, une tendance accentuée depuis la crise sanitaire du Covid-19.
Dans cet article, nous allons d’abord analyser le contenu pédagogique de ce nouvel outil basé sur les émotions et la psychologie scientifique, avant de présenter les avis partagés des experts en psychiatrie infantile. Nous décrirons ensuite la stratégie gouvernementale de communication via des partenariats publics-privés, ainsi que la place centrale de Disney France dans cette démarche. Enfin, nous évoquerons les limites de ce type d’initiative face aux défis structurels de la pédopsychiatrie en France.
Un outil ludique inspiré de la psychologie scientifique
Le cœur du dispositif « Parlons santé mentale » repose sur un fascicule éducatif qui utilise les personnages emblématiques de Vice-Versa pour incarner les émotions fondamentales : joie, colère, tristesse et peur. Cette personnification facilite la compréhension par les enfants des mécanismes émotionnels, souvent complexes à saisir à leur âge. Le fascicule pose des questions simples mais essentielles telles que « La santé mentale, c’est quoi ? » ou « Les émotions, c’est quoi ? », encourageant ainsi les jeunes à s’interroger sur leurs ressentis et à apprendre à les nommer.
Ce support pédagogique s’appuie sur des bases scientifiques solides. Le film Vice-Versa s’inspire en effet des travaux du psychologue américain Paul Ekman, spécialiste des émotions universelles. Cette rigueur scientifique confère une crédibilité au projet et répond aux besoins d’une pédagogie adaptée aux enfants d’aujourd’hui, qui, selon une enquête du HuffPost, nécessitent des supports plus dynamiques et interactifs, avec des changements fréquents de sujet pour maintenir leur attention.
En plus du fascicule, des spots publicitaires mettant en scène les personnages de Disney seront diffusés à la télévision, sur les réseaux sociaux et même dans certains hôpitaux, renforçant ainsi la portée du message. Cette multi-diffusion vise à toucher les enfants dans divers environnements, favorisant la répétition et la mémorisation des notions clés. Les enseignants pourront également accéder à ces ressources via les plateformes pédagogiques nationales, facilitant l’intégration de cette thématique dans les programmes scolaires.
Le fascicule encourage explicitement les enfants à ne pas rester seuls face aux émotions difficiles, un message crucial dans un contexte où le sentiment d’isolement peut aggraver les troubles psychiques. En s’appuyant sur un univers connu et apprécié, cette approche ludique offre un cadre rassurant pour aborder des sujets parfois tabous.
Pour ceux qui souhaitent en savoir plus sur l’univers de Vice-Versa, le site DLRP propose une revue complète du film Vice-Versa 2, mettant en lumière son impact culturel en France.

Les psychiatres partagés sur la pertinence du dispositif
Malgré l’accueil globalement positif, la communauté scientifique et les spécialistes de la santé mentale infantile expriment des réserves sur ce partenariat entre le gouvernement et Disney. Ces critiques soulignent notamment le risque d’une instrumentalisation commerciale des questions de santé mentale.
Rachel Bocher, cheffe du service hospitalier de psychiatrie au CHU de Nantes, adopte une position nuancée : elle reconnaît que l’univers cinématographique de Disney peut constituer un imaginaire commun utile pour l’identification des émotions chez les enfants. Selon elle, ces références permettent une projection qui aide les jeunes à mieux comprendre leurs propres ressentis.
En revanche, Hugo Peyre, pédopsychiatre au CHU de Montpellier, s’inquiète de la dimension commerciale. Il regrette que la stratégie marketing de Disney s’immisce dans les écoles et estime qu’il serait préférable de développer des supports éducatifs sans marques commerciales, voire avec des studios français, afin de conserver une certaine indépendance culturelle et scientifique.
Wissam El Hage, responsable du Centre régional de psychotraumatologie Centre-Val-de-Loire, met en garde contre une simplification excessive des enjeux complexes liés à la santé mentale. Il évoque le risque de « marketisation » où des sujets sensibles sont transformés en produits grand public, ce qui pourrait déformer la réalité des troubles psychiques et nuire à leur prise en charge sérieuse.
Richard Delorme, responsable du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital Robert Debré, va plus loin en comparant ce type d’initiative à un « menu équilibré McDo ». Pour lui, les bonnes intentions ne suffisent pas : la pédopsychiatrie manque cruellement de moyens et de soutien, et ces campagnes risquent de galvauder l’image de la santé mentale en masquant les difficultés réelles.
Enfin, Bruno Falissard, président de la Société Française de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, souligne une problématique structurelle majeure. Ce genre de projet, peu coûteux, peut certes rendre service, mais il ne répond pas à l’urgence des besoins. Pendant que la communication se déploie, les patients psychiatriques, en particulier les enfants les plus souffrants, voient leurs soins diminuer, faute de ressources suffisantes.
Ces critiques appellent à une réflexion approfondie sur l’équilibre entre sensibilisation ludique et rigueur scientifique. Pour approfondir ces points, la page DLRP revient sur les controverses autour de la communication Disney et santé mentale.
300 partenaires pour la communication gouvernementale
Cette campagne s’inscrit dans une stratégie gouvernementale plus large de mobilisation des acteurs privés pour diffuser des messages d’intérêt général. Michaël Nathan, du SIG, explique que la période du Covid-19 a profondément modifié la communication institutionnelle, ouvrant la voie à une collaboration accrue avec des entreprises et des associations. Aujourd’hui, plus de 300 partenaires participent à des campagnes diverses, illustrant cette nouvelle dynamique.
Cette démarche est visible dans d’autres projets, comme la mini-série Adolescence, diffusée sur Netflix, qui vise à alerter les jeunes sur les dangers des réseaux sociaux et des mouvements virilistes. Cette diversité des supports témoigne d’une volonté d’adaptation aux modes de consommation actuels des enfants et adolescents, qui exigent des formats variés et interactifs.
Le gouvernement mise ainsi sur la culture populaire pour atteindre efficacement les jeunes publics. Ce choix répond à un constat : les supports traditionnels d’éducation à la santé mentale sont souvent perçus comme trop austères ou déconnectés des réalités des enfants. En s’appuyant sur des univers connus comme celui de Disney, la communication gagne en impact et en mémorabilité.
Cette stratégie est également un moyen de toucher un public large, au-delà des seuls milieux scolaires, en utilisant les réseaux sociaux, la télévision et même les hôpitaux comme vecteurs. Pour mieux comprendre ce réseau de partenaires, le site DLRP propose un aperçu des collaborations culturelles entre Disney et institutions.

Disney France au centre du dispositif de communication
La conférence de presse du 9 octobre a été animée par Hélène Etzi, présidente de Disney France, qui a souligné l’ambition du groupe : « Chez Disney, notre métier c’est de raconter des histoires, divertir, inspirer. Mais au-delà, nos histoires et les personnages qui les portent ont la capacité d’accompagner les enfants et les parents dans le développement émotionnel. » Cette déclaration place Disney non seulement comme un acteur culturel, mais aussi comme un partenaire de santé publique.
Disney a décidé de mettre à disposition son écosystème complet pour maximiser l’impact de la campagne. Le film Vice-Versa sera mis en avant sur les plateformes de streaming Disney+, mais aussi rediffusé dans les salles UGC, contribuant ainsi à la médiatisation de la santé mentale. Cette double stratégie, combinant communication institutionnelle et marketing grand public, soulève cependant des questions sur la frontière entre action de santé publique et opération commerciale.
Par ailleurs, la filmographie de Disney n’a pas toujours été exemplaire en matière de représentation des questions psychologiques. Une étude publiée dans le British Medical Journal en décembre 2024 a pointé certains stéréotypes véhiculés par les films du studio, notamment des représentations irréalistes des relations amoureuses et des critères de beauté inaccessibles, qui peuvent nuire à l’estime de soi des jeunes spectateurs.
Cette ambivalence est au cœur du débat actuel. Rachel Bocher, psychiatre au CHU de Nantes, note que même si ce n’est pas toujours parfaitement aligné avec la science, l’univers Disney permet une identification et une évasion nécessaires. Elle suggère de laisser le temps à cette expérimentation pour en évaluer les résultats.
Pour ceux qui souhaitent explorer plus en détail la stratégie de Disney France, le site DLRP analyse les événements et campagnes promotionnelles autour de Vice-Versa 2, donnant un aperçu complet des actions de communication du studio.
Un pansement face à la crise structurelle de la pédopsychiatrie
Si la campagne « Parlons santé mentale » apporte une réponse innovante et visible à la sensibilisation, elle ne doit pas masquer une crise profonde dans la pédopsychiatrie française. Bruno Falissard rappelle que ce type d’initiative, bien que peu coûteuse et utile, ne répond pas à la pénurie criante de moyens dans le secteur. Les enfants souffrant de troubles graves voient leurs demandes de soins s’accroître tandis que les ressources diminuent.
Cette déconnexion entre communication et réalité des soins pose un vrai dilemme. Richard Delorme souligne que la bonne volonté ne suffit pas à compenser le manque de personnel et de structures. Le risque est que ces campagnes deviennent des substituts symboliques, « pansements » médiatiques qui ne traitent pas les causes profondes des difficultés.
Les experts appellent donc à un rééquilibrage des priorités budgétaires, avec un soutien accru à la pédopsychiatrie, tout en continuant à développer des outils pédagogiques adaptés. L’enjeu est de ne pas galvauder l’image de la santé mentale et de garantir une prise en charge sérieuse pour les enfants en souffrance.
Il faudra observer dans les prochains mois l’impact réel de la campagne « Parlons santé mentale » et son intégration dans un dispositif global plus large. En attendant, cette initiative représente une première étape importante, même si elle ne peut être une fin en soi.

Conclusion
La campagne gouvernementale « Parlons santé mentale », lancée en partenariat avec Disney France et s’appuyant sur l’univers de Vice-Versa, marque une évolution notable dans la sensibilisation des jeunes à la santé mentale. En utilisant un outil ludique et scientifiquement inspiré, elle permet de mettre en lumière les émotions et encourage l’expression des difficultés psychiques dès le plus jeune âge.
Cependant, cette initiative suscite des débats importants au sein de la communauté scientifique, notamment sur le rôle des grandes marques commerciales dans l’éducation à la santé, ainsi que sur les risques de simplification et d’instrumentalisation. Par ailleurs, elle ne remplace en rien les besoins criants en matière de moyens et de soins dans la pédopsychiatrie française.
La stratégie gouvernementale d’associer la culture populaire et les partenariats privés dans la communication publique ouvre de nouvelles perspectives, mais elle doit être accompagnée d’un renforcement des structures de soin et d’un suivi rigoureux de l’efficacité des outils déployés. Disney France, en tant qu’acteur central de cette campagne, joue un rôle à double tranchant entre engagement sociétal et enjeux commerciaux.
Pour aller plus loin, les éducateurs, parents et professionnels sont invités à consulter les ressources officielles et à suivre les retours d’expérience. Vous pouvez également découvrir plus sur l’univers de Vice-Versa et ses implications éducatives sur DLRP, une source spécialisée sur les actualités Disney.
Enfin, n’hésitez pas à partager cet article et à vous engager dans la conversation autour de la santé mentale des enfants, un sujet plus que jamais d’actualité et essentiel pour notre société.





