Crabe géant terreur des profondeurs océaniques, Tamatoa est un « méchant » particulièrement marquant, bien que brièvement présent dans « Vaiana ».
Découvrons ensemble qui est vraiment le plus terrible des monstres de Lalotai.
Une métamorphose radicale.
Tamatoa nous apprend qu’il fut un jour un « petit crabe triste » transformé par l’humiliation.
Accumulant toutes sortes de richesses (impérativement brillantes) sur son dos, il les utilisa pour attirer des proies. Sa passion du bling-bling lui a ainsi permis d’assurer sa survie. Devenu immense, Tamatoa est désormais la plus grande terreur de Lalotai, le royaume des monstres.
Face à Maui : être le meilleur à tout prix.
Plus grand, plus fort, plus riche, notre grand méchant a voulu montrer à celui qu’il considère comme son rival ainsi qu’un demi-dieu n’est pas de taille à s’opposer à lui.
Très envieux de ce que fut Maui dans le passé, le plus immense des crabes n’hésite pas à utiliser sa cruauté narcissique pour atteindre le moral du demi-dieu…
Une méchanceté visant à anéantir Maui physiquement comme mentalement..
En ironisant sur les tatouages du demi-dieu qu’il dit avoir admirés, Tamatoa cherche à remuer bien des choses chez celui qu’il considère comme un ennemi insignifiant.
En effet, Maui a eu son premier tatouage lorsque ses parents l’ont rejeté…
De plus, le crabe ne manque pas de remuer le couteau dans la plaie en évoquant le rejet de ces hommes dont il a tant cherché l’estime et l’affection.
Face à Vaiana : une curiosité mêlée d’envie.
Si le colosse voit arriver la jeune fille avec surprise, il n’en a pas peur un seul instant.
Assez curieux de cette petite humaine qui lui fait face bravement, Tamatoa réagit très vivement lorsqu’il aperçoit ce petit objet brillant sur Vaiana. Il croit ainsi avoir accès au joyau de sa collection : le cœur de Te Fiti…
Une malice inhabituelle.
Habitué aux confrontations brutes, Tamatoa ne s’imagine même pas que la jeune fille puisse chercher à l’arnaquer. Il se fait un plaisir de s’écouter parler en se vantant auprès de la petite humaine… Il essaiera évidemment de se saisir du cœur de Te Fiti dont il ne doutera pas un seul instant de l’authenticité.
Une ruse efficace.
Un leurre qui sera efficace au point que non seulement la collection du crabe ne trouvera pas son apogée, mais elle perdra sa pièce maîtresse : l’hameçon de Maui.
Comment ce terrible personnage a-t-il pu en arriver là… Ce roi du bling-bling est-il vraiment tout en méchanceté pure comme il aime à le montrer ?
Une richesse apparente compensatrice.
Face à lui-même, Tamatoa n’est-il finalement pas mis face à la plus profonde des solitudes ?
Effectivement, il est certes le plus grand, mais terré dans son refuge. S’il s’en sert de piège pour ses proies, ne s’en sert-il pas également comme la bulle protectrice d’un moral fragile ?
Une si grande soif de reconnaissance.
Il est possible que ce terrible monstre cache une réelle fêlure de l’âme devenue inapte aux relations sociales…
Ses richesses et son apparence seraient alors ses bouées de sauvetage.
Une confiance en lui réelle ou simulée ?
En toute circonstance, Tamatoa montre une grande assurance mêlée de détermination.
Un monstre narcissique ou un crabe devenu géant pour cacher ce qu’il ressent vraiment ?
En effet, il se moque de ce que peut ressentir Maui, victime de terribles rejets.
Une facette douloureuse.
Face à leurs vécus respectifs, Tamatoa nous montre une autre facette de lui-même.
Celle du caïd qui n’en a que l’apparence, et qui au final tente de diminuer par la dérision ce qui le terrorise le plus, ce qui lui fait le plus de mal…
Partant de ce postulat, on peut légitimement s’interroger sur la nature profonde du monstre des mers.
Un « vrai » méchant ?
Bien que les conséquences soient bel et bien présentes, Tamatoa peut-il prétendre à cette qualité de méchant foncier ?
Rien n’est moins sûr.
On pourrait effectivement imaginer être en présence d’un individu immature certes, et qui dans son immaturité a évolué dans un mauvais sens pour tenter d’exister du mieux possible.
Que peut ressentir ce potentiel grand timide ?
Posons les termes de notre réflexion. Nous sommes en effet devant un petit crabe triste… Rejeté et humilié, son immaturité ne lui pas permis d’en sortir grandi, drapé dans son courage ; son vécu lui ayant fait perdre toute foi en qui que ce soit, c’est sur lui-même qu’il s’est reposé.
Une mutation radicale.
Avec les « moyens du bord », il a trouvé la solution la moins difficile pour lui, pour continuer à avancer.
De fragile victime, il est ainsi devenu dangereux prédateur.
Une peur terrible.
Pour en arriver là , on peut imaginer une grande souffrance. Une douleur tellement énorme qu’il apparaissait inconcevable de ne serait-ce qu’en endurer la moitié !
Cette obsession de ne plus souffrir a tout à fait pu pousser Tamatoa à ce comportement extrême de compulsion, de prédation et de mépris.
Le paradoxe du crabe.
Le personnage au même titre que l’animal existant réellement est un paradoxe vivant, extrêmement inspirant au demeurant.
Une apparente solidité : qu’en est-il de l’intérieur ?
L’animal utilisé comme modèle pour Tamatoa est exceptionnellement bien trouvé !
Effectivement, le crabe est un animal à carapace dure, il mue si cette carapace ne lui permet plus de continuer une vie normale…
C’est tout bonnement ce qu’a fait notre crabe préféré !
Une analogie exceptionnelle, à double titre.
Physiquement, le crabe est un être à chair tendre enfermé dans une carapace dure, ponctuée de pinces, de pointes et même de poils urticants! Le but évident : se protéger. Eviter à tout prix d’être une proie.
Moralement, Tamatoa est peut-être bien cet être ultrasensible qui pour se préserver s’est caché dans sa carapace immense et couverte de richesses !
Les problèmes existentiels soulevés par ce paradoxe.
De vrai méchant, Tamatoa cherche peut-être simplement à se persuader qu’il l’est réellement. Dur, méchant et cruel, il ne veut plus jamais être ce petit crabe triste qu’il a désormais en horreur absolue.
N’est-ce-pas le cas de bien des êtres aux comportements parfois dur envers les autres ?
Les richesses comme « point d’ancrage ».
Ce monstre des profondeurs se raccroche à ses richesses comme étant sa qualité principale. Il s’est physiquement mis à l’abri grâce à elles.
D’une part il est naturellement cupide et les aime pour ce qu’elles sont.
D’autre part ces richesses lui ont permis de subsister en attirant ses proies par leur brillance !
Une cupidité révélatrice d’un terrible besoin de sécurité.
Cette mise à l’abri par le bling-bling est physique, morale par le caractère naturellement cupide du personnage étudié aujourd’hui…
Au-delà de cette cupidité naturelle, c’est un équilibre affectif que s’est trouvé Tamatoa. Cette richesse toute en brillance comble ce besoin d’aimer qui, chez lui, s’est cristallisé sur son trésor bling-bling, cette carapace recouverte faisant ainsi toute sa fierté.
Tamatoa ne se résume peut-être pas au crabe géant qu’il nous montre.
Ce terrible monstre des profondeurs a finalement son côté attendrissant… Jeune individu immature, il a fait comme il a pu pour souffrir le moins possible ; même si, pour cela, il lui a fallu développer sa cruauté, son autosuffisance et son immense narcissisme.
Un clin d’œil post-générique.
C’est avec humour qu’en scène post-générique de Vaiana, il ironisera sur sa situation. Rappelons en effet qu’il a été retourné dans la lutte, ne pouvant ni se relever ni récupérer ses richesses.
Une référence amusante.
Il appelle donc à l’aide, en disant que pour être enfin secouru, il lui faudrait s’appeler Sébastien… Une référence au petit crabe co-star d’Ariel dans La Petite Sirène !
Le film se termine ainsi sur le géant qui, même avec humour, nous donne comme un rappel de sa fragilité passée, existant toujours en lui.
Un retournement révélateur.
Son retournement physique révèle que finalement sa situation qu’il pensait ultra-protectrice n’est pas si sûre que cela… En effet, il a fini par être retourné : en un instant, toutes ses richesses sont tombées de son dos, et lui même s’est retrouvé dans l’incapacité physique de se remettre seul debout.
Ayant perdu son autonomie, il s’est retrouvé dans une situation précédemment redoutée : avoir besoin d’aide.
Un mal pour un bien ?
Sa nouvelle situation permettra-t-elle à Tamatoa de trouver le chemin de l’ouverture aux autres ?
Si nous ne le savons pas encore, nous pouvons du moins souhaiter cette belle évolution à Tamatoa.
Evoluer avec et non pas malgré les autres, tout en parvenant à se réserver un minimum : n’est-ce-pas finalement une aspiration universelle?