Le moins que l’on puisse dire, c’est que les films Disney ont marqué toutes les générations depuis une centaine d’années maintenant. Comment peut-on expliquer le succès et la longévité des histoire Disney ?
Il est sûrement un point commun à tous les films Disney, c’est celui de voir son héros embarqué dans une aventure, souvent malgré lui. Une sorte d’appel de l’aventure, le tout sous une musique qui enchante et au milieu de paysages féérique et des chansons comme Sans Aucun Lien. Voilà certainement les caractéristiques qui guident les choix des histoires à adapter chez Disney.
Un deuxième film
Prenons l’exemple de Pinocchio, le deuxième long-métrage d’animation sorti en 1940. Le choix du livre de Collodi, une histoire aussi éloignée de Blanche-Neige n’est pas anodin.
Walt, qui est un visionnaire, un créatif, sait que plus difficile encore que de produire son premier long-métrage, ce sera d’envisager les suivants. Et il ne tombe pas dans le piège de la facilité. Pour les films suivants, il quitte l’univers des princesses pour le monde des animaux et des héros.
Deux projets
Walt a toujours su devancer les projets. Dès 1935, alors que Blanche-Neige et les Sept Nains n’en est encore qu’à ses balbutiements, Disney envisage d’adapter l’œuvre de Salten sur les premiers pas de Bambi. Il en acquiert les droits durant l’été 1937. Mais l’animation naturaliste est un frein.
Entretemps, en septembre de la même année, l’animateur Norman Ferguson suggère l’adaptation des Aventures de Pinocchio de Carlo Collodi. Après avoir lu le livre, Walt sent qu’il tient là l’histoire rêvée et il décide de l’adapter avant de terminer Bambi.
Une adaptation difficile et coûteuse
Le challenge n’était pas évident. Dans le cas de Blanche-Neige, il avait fallu étoffer ce qui n’était qu’un conte. Ici, il s’agit d’un roman. Trop de personnages, trop de détails. Il fallait donc élaguer pour en produire un film qui ne sera donc pas une reproduction exacte mais bien une version de l’histoire qui appartient à Walt.
Et cela donnera une vision toute autre du personnage. Si chez Collodi, il s’agit d’un infâme garnement insupportable voire perfide, Disney en fait un enfant influençable que mène sa naïveté mais qui apprendra la leçon. Une transformation qui sera d’ailleurs très coûteuse- pour les Studios !
Ce qu’il faut comprendre c’est que Walt Disney n’adapte pas une histoire. Il se l’approprie. Il confie à Norman Ferguson un défi important puisqu’il ne s’agit pas d’étoffer un conte pour en faire un film mais de travailler une histoire très construite, trop riche en scènes diverses et portée par un héros insupportable.
Le travail se met en place pendant la finalisation de Blanche-Neige et les Sept Nains et le déménagement des Studios à Burbank … Bref, quand Walt découvre le projet … il envoie le tout à la poubelle … Six mois de travail perdus engloutissant 500 000 dollars !
On efface tout et on recommence !
Recette du succès
Walt va reprendre ce qui fait le succès de Blanche-Neige et rendre le personnage plus attachant.
Le pantin sera alors « humanisé » même s’il reste une marionnette. On lui offre les fossettes sympathiques de Mickey et la célèbre paire de gants. On lui ajoute de grands yeux candides et il prend un peu de rondeur. Bref, Pinocchio devient touchant sous ses airs d’innocence.
Bref, après une jeune princesse, ce sera donc le tour d’un petit héros dans lequel les plus jeunes se reconnaissent et avec qui les adultes replongent dans leur enfance grâce à des références universelles.
L’étoffe d’un héros
Avec Pinocchio, Walt Disney nous offre une histoire différente de celle de Collodi, basée sur les aventures du petit pantin à travers toute une série d’étapes commune à tous les héros de tous les temps. C’est ce qu’un certain Joseph Campbell appellera le voyage du héros.
Et même si le pantin ne me semble pas si héroïque, il en connaît toutes les épreuves.
Les étapes d’un héros sont : le monde ordinaire – l’appel à l’aventure – le refus et la séparation – une aide surnaturelle et le lancement dans l’aventure – l’épreuve de la caverne – et le retour.
Au début de l’histoire, le personnage est dans un monde très ordinaire, une petite marionnette dans l’atelier de Gepetto.
Et tout à coup, il se passe quelque chose qui vient tout perturber. C’est l’arrivée de la Fée Bleue donne vie à une marionnette en bois et lui lance le défi d’une aventure de petit garçon brave, franc, loyal et obéissant.
Mais, par facilité, Pinocchio refuse d’écouter. Bien mal lui apprendra et il vivra toutes une série de mésaventures pour comprendre qu’il doit rentrer chez lui.
Mais là, catastrophe, Gepetto, parti à sa recherche, a été avalé par une baleine. Le pantin sait alors qu’il doit se lancer dans une aventure même dangereuse. Il n’est pas seul puisqu’il a l’aide précieuse de Jiminy Cricket. De sa propre volonté, il se détourne du quotidien et va affronter le mammifère marin pour sauver son père. Quand il est avalé, c’est bien l’épreuve suprême dans laquelle il se lance au péril de sa vie. Heureusement il va vaincre le monstre et peut revenir à l’atelier où tout a commencé.
Si ça ce n’est pas gagner ses galons de héros ! D’ailleurs la Fée Bleue le récompense en faisant de lui un vrai petit garçon.
Sans Aucun Lien : Une chanson maladroite
Pinocchio a suivi l’itinéraire d’une transition de l’enfance à l’âge de raison : Séparation – apprentissage dans des épreuves parfois terribles et, en quelque sorte, renaissance. Pinocchio est bien un héros. Un héros qui a sa chanson !
La musique dans Pinocchio est moins présente que celle de Blanche Neige et les Sept Nains. Et pourtant, elle est l’expression même de la vie de la marionnette.
Lorsque Gepetto termine de peindre son pantin, il exprime sa joie en le faisant danser au bout de ses fils.
Le deuxième épisode de danse sera différent. Pinocchio est la vedette du théâtre de Stromboli. Il est la première marionnette à danser sans être manipulé puisque la fée Bleue l’a délivré de ses ficelles … C’est ce qu’il exprime dans sa chanson Sans aucun lien.
C’est là sa seule véritable chanson qui, paradoxalement, ne nous le montre pas comme un héros tant il est maladroit.
Succès
Pinocchio est le premier film Disney à être nommé aux Oscars et c’est à la musique qu’il le doit puisque la bande originale est gratifiée d’une statuette. Mais le grand succès du film sera Quand on prie la bonne étoile qui remporte l’Oscar de la meilleure chanson. Il faudra attendre 1964 et Mary Poppins pour voir à nouveau les Studios soulever deux trophées.
Le film lui-même reçoit. Spectateurs et critiques seront séduits par ce qui est considéré comme l’un des plus grands chef d’œuvre des Studios Disney. Pourtant, le film sera un échec commercial. Malheureusement, Pinocchio sort en 1940 et la période troublée ne permet pas de l’exporter en Europe. Il faudra attendre plusieurs années pour que le vieux continent découvre ce petit héros attachant.
Un héros qui ouvrira la voie à beaucoup d’autres …
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