Chapitre 1 — Une princesse singulière dans l’univers Disney
Dans l’univers des contes animés, les princesses Disney et leurs chansons emblématiques font rêver petits et grands. Qui n’a jamais fredonné le chant libérateur d’Elsa, vibré avec le rêve d’Ariel de « partir là-bas », ou encore été touché par d’autres mélodies portées par l’espoir, le courage et l’identité ?
Pourtant, au-delà de ces figures bien connues, une princesse singulière a rejoint, d’une certaine manière, l’univers Disney : Anastasia. Et une de ses chansons nous vient en tête : « Loin du Froid de Décembre ».
Contrairement à Belle, Ariel ou Elsa, elle n’est pas une création originale des studios. Le film « Anastasia » provient en réalité de la Fox Animation. Mais en 2017, avec le rachat de la Fox par Disney, il a intégré officiellement le vaste catalogue du géant de l’animation.
Cela ne fait pas d’Anastasia une « princesse Disney » au sens strict, mais l’esthétique du film, sa structure narrative et surtout sa richesse musicale la rapprochent fortement de ses homologues. D’ailleurs, certains admirateurs réclament son intégration officielle au panthéon des princesses Disney.
Chapitre 2 — Un mythe historique devenu récit romanesque
Le film raconte une version romancée de la vie d’Anastasia Nikolaevna, la fille du dernier tsar de Russie, Nicolas II. En juillet 1918, la famille impériale est exécutée à Ekaterinbourg par les Bolcheviks. Anastasia n’avait alors que 17 ans.
Or, les corps n’ayant pas été retrouvés immédiatement, une rumeur circule : la jeune princesse aurait pu échapper au massacre. Ce doute nourrit un mythe durable, renforcé par le témoignage d’Anna Anderson, une femme qui se fit longtemps passer pour Anastasia. La recherche historique a confirmé depuis que la princesse faisait bien partie des victimes, mais la légende a inspiré de nombreuses fictions.
Le film de la Fox choisit de s’inscrire dans cette veine romanesque en imaginant qu’Anastasia a survécu. Elle y est dépeinte comme une orpheline sans passé, marquée par une malédiction, mais promise à retrouver ses racines et son identité. Cette construction narrative en fait une héroïne universelle : perdue, mais guidée par le destin vers la réconciliation avec son histoire.
Le ton oscille entre violence révolutionnaire et douceur d’une mémoire familiale, entre chaos de l’Histoire et quête intime. L’émotion est incarnée à travers une chanson récurrente qui devient le symbole de cette mémoire perdue : « Loin de décembre ».
Chapitre 3 — « Loin de décembre », la chanson de la mémoire
Au centre du récit se trouve la chanson « Once Upon a December » — « Loin de décembre » dans sa version française. Ce n’est pas une simple mélodie douce et nostalgique : elle est véritablement le moteur émotionnel et narratif du film. Elle relie Anastasia à son passé, à son identité et à l’amour de sa famille.
Dans le prologue, l’impératrice douairière Marie la chante comme une berceuse à sa petite-fille, en l’accompagnant d’une boîte à musique. Cet objet, en apparence anodin, devient le symbole d’une filiation brisée et d’un amour qui transcende la séparation.
Bien plus tard, alors qu’Anya — l’héroïne amnésique — explore les ruines du palais de Saint-Pétersbourg, la mélodie ressurgit. La chanson déclenche une réminiscence bouleversante : des fantômes dansants apparaissent, incarnant des souvenirs flous mais chaleureux. L’émotion est intense, car la chanson agit comme une clé de mémoire, permettant à l’héroïne de se reconnecter à son passé et de retrouver sa véritable identité.
La composition de la chanson elle-même renforce cette dimension. Ce qui commence comme une berceuse se développe comme une valse, évoquant à la fois les bals impériaux, le rêve et le temps qui tourne, cyclique comme la mémoire. Les paroles françaises, fidèles à l’émotion de la version originale, parlent de danses dans la neige, de bougies éteintes, de voix oubliées et de promesses lointaines. Ces images poétiques traduisent la fragilité des souvenirs et la nostalgie d’un monde disparu.
Chapitre 4 — La signature musicale et les interprètes
La chanson est signée Stephen Flaherty, compositeur américain reconnu pour son travail au théâtre musical. Avec la parolière Lynn Ahrens, il forme un duo majeur de Broadway, réputé pour sa capacité à allier émotion, narration et richesse musicale. Pour Anastasia, Flaherty a choisi un style qui s’inscrit dans la tradition des valses russes, rappelant l’atmosphère des ballets de l’époque impériale et ajoutant une dimension historique à l’œuvre.
Dans le film, la chanson revient à plusieurs moments-clés, interprétée par différentes voix. La première fois, sous forme de berceuse, elle est chantée par Angela Lansbury, qui double la grand-mère d’Anastasia, et Lacey Chabert, qui incarne la fillette. Plus tard, lorsque l’héroïne redécouvre la chanson, c’est Liz Callaway qui lui prête sa voix adulte. Dans le final, Angela Lansbury et Liz Callaway unissent leurs voix, symbolisant la réunion des deux personnages.
En français, la chanson a connu un regain de popularité grâce à une reprise d’Hélène Ségara. Bien qu’elle ne fasse pas partie de la bande originale, sa version se distingue par une orchestration qui combine les sonorités russes et le tintement délicat de la boîte à musique, renforçant l’émotion du morceau.
Chapitre 5 — Héritage et reprises contemporaines
Depuis la sortie du film, « Loin de décembre » a été reprise à plusieurs reprises, tant en français qu’en version originale. Parmi elles, une interprétation récente se distingue : en 2020, le groupe Pentatonix propose dans son album de Noël We Need a Little Christmas une version a cappella douce et moderne qui fait redécouvrir ce classique à un nouveau public.
Ces multiples réinterprétations confirment le statut particulier de cette chanson. Bien plus qu’une simple illustration musicale, elle est un véritable fil narratif reliant le passé au présent, l’enfance à l’âge adulte, la perte à la réconciliation. Elle incarne la mémoire chantée d’une légende qui, à travers la magie du cinéma et de la musique, trouve une place intemporelle dans l’imaginaire collectif.
