Parmi toutes les Princesses Disney, il y en a une qui ouvre la voie des femmes de caractère et c’est Belle.  Contrairement à celles qui précèdent – Blanche-Neige, Cendrillon, Aurore … et même Ariel – Belle nous apprend très vite qu’elle aspire à autre chose mais surtout, cette jeune fille intelligente, cultivée, romantique mais aussi imaginative, ne s’accroche pas à l’idée qu’un jour son prince viendra.  Pourtant, elle trouvera son Prince, au moment le plus inattendu. C’est ce que démontre Je Ne Savais Pas.

Evolution du caractère

Le moins qu’on puisse dire, c’est que personne ne s’attend à voir l’amour surgir entre la jeune fille et un être tellement monstrueux voire antipathique. 

Et ce revirement c’est une nouveauté chez Disney.  Jusque-là, aucun film n’avait présenté une telle évolution de caractère.  L’effrayante et menaçante Bête qui, au début film, montre son tempérament violent et égoïste, va, petit à petit, développer sa capacité à une certaine retenue voire, un soupçon de courtoisie.  

Cela débute dans la scène où il défend Belle contre une meute de loup mais on comprend le véritable changement lorsqu’il est confronté au choix de laisser la jeune fille rejoindre son père.  

Mais ce qui appuie cette évolution, c’est lorsque, dans la neige, Belle apprend à la Bête à s’approcher des oiseaux.  

Je Ne Savais Pas : Un changement de cap

La scène est portée par la chanson « Je ne savais pas », un moment sublime qui exprime si bien les sentiments naissants de ces deux personnages.  Et pourtant un moment que l’on a failli ne pas connaître car ni cette scène ni cette chanson que l’on devait retrouver dans la version première.

A la place, nous aurions dû voir la ribambelle des objets enchantés du château évoluant sur une valse entraînante en espérant de tout cœur que la Bête et Belle se rapprochent, tombent amoureux.  Ils pourraient ainsi reprendre leur forme humaine.  C’est d’ailleurs ce qu’ils chantent : Human Again.

Ni Belle ni la Bête ne chantent dans la chanson, même s’ils sont présents.  On les voit juste dans une scène brève où Belle apprend à lire à la Bête.

Une scène qui passe à la trappe

Si la chanson passe à la trappe et est remplacée par Something There (Je ne savais pas, en français), c’est, tout d’abord, parce qu’elle faisait 11 minutes, ce qui assez lourd dans un film d’animation qui comporte beaucoup de passage musicaux.

Mais, surtout, elle posait des problèmes dans l’histoire même.  Dans sa structure, elle évoquait le passage du temps et des mois qui s’écoulent.  Et la production ne savait pas quoi faire des autres personnages.  Que fait Maurice ?  Il tourne inlassablement dans la forêt ?  Et Gaston, il vit dans la taverne, une chope à la main ?  Bref, il fallait trouver une séquence plus courte.

Alors que Menken et Ashman avait déjà enregistré une version démo de Human Again, il vont proposer de la remplacer par la plus courte « Something There » pendant laquelle Belle et la Bête s’ouvrent lentement et avec hésitation l’un à l’autre. Et on peut dire que la chanson fait honneur à la fois à la profondeur émotionnelle du conte et à l’étrange mystère qui flotte.  

Les deux personnages sont déterminés et méfiants et doivent tous deux faire un pas.  Si la Bête doit apprendre à vaincre sa nature monstrueuse, Belle doit apprendre à regarder au-delà des apparences.  On assiste donc à une chanson qui montre les personnages à la fois différents mais égaux, ce qui rend cette histoire très romantique.  

Retour de Human Again

On pouvait regretter de ne pas connaître l’avis des objets du château.  C’est maintenant réparé.  

Disney a réédité le film en 2001 pour célébrer ses 10 ans.  Et il voulait lui apporter un petit plus.  Or, quand Alan Menken a porté l’histoire sur la scène de Broadway, il avait trouvé un moyen d’intégrer Human Again dans la comédie musicale.  Il a simplement supprimé l’allusion au temps qui passe !

Dans cette nouvelle version, la scène fait maintenant suite à Something There la chanson que le Bête et Belle chantent pendant qu’ils font une petite bataille de boules de neige.  Human Again enchaîne donnant une perspective d’espoir aux objets.  Et ce moment se termine par Beauty and the Beast, point culminant du romantisme.

Influence d’Ashman

Ce qui fera une grande partie de la magie de cefilm, c’est le duo Ashman et Menken, un duo à l’origine du renouveau chez Disney.

Quand Ashman est contacté pour travailler sur les paroles de la Petite Sirène, il sait qu’il n’y a qu’un compositeur pour écrire la musique parfaite : Alan Menken.  C’est cette alchimie qui allait transparaître dans toutes leurs collaborations.

En ce qui concerne La Belle et la Bête, quand on demande au compositeur d’expliquer leur travail, il répond qu’Ashman et lui ont simplement raconté une histoire mais qu’il est certain que la maladie d’Ashman a conduit les choix musicaux.  Le parolier vivait ses derniers jours et cette émotion sera transmise dans une palette de musique française, classique et de Broadway.

De son lit d’hôpital, Ashman continue à participer à la gestion de la production du film et jouera un rôle essentiel dans la construction des personnages.  Howard Ahsman, affaibli, n’avait presque plus de voix.  Il murmurait ses directives à Menken, qui les répétait à voix haute à l’équipe. 

Il y a, par exemple, ce moment où Paige O’Hara et Robby Benson enregistre le duo de « Je ne savais pas ».  O’Hara chantait de manière trop douce.  Ashman a murmuré « Streisand ». La chanteuse a alors modifié sa phrase et a donné un caractère particulier à Belle.

Ashman fut donc l’âme véritable du film.  Le générique du film le souligne d’ailleurs.  On peut y lire : « Nous serons éternellement reconnaissants à notre ami Howard, qui a donné sa voix à une sirène et son âme à une bête. »

Récompenses

Les récompenses salueront aussi ce travail puisque le film obtiendra deux Oscars et deux Grammy Awards pour la meilleure musique et pour la meilleure chanson originale pour Beauty and the Beast.  

Musique et chanson seront aussi salués par un Golden Globe auquel s’ajoute le Golden Globe du meilleur film musical.  

Et puis ce sera la première fois qu’un film d’animation sera nommé pour l’Oscar du meilleur film.

Et en 2002, il est sélectionné pour faire partie des films conservés à la Bibliothèque du Congrès américain « pour son intérêt historique, esthétique et culturel »

Emma Watson et Something there

La chanson Something There, présente dans le film original, dans sa réédition, dans une comédie musicale aussi, ne pouvait qu’être reprise dans le live action.

On ne pouvait pas se passer de ce moment de romantisme.  C’est d’ailleurs le premier extrait musical qui sortira en avant-première et qui nous fera découvrir la jolie voix d’Emma Watson qui rend hommage à une animation devenue un chef d’œuvre.

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